L’été, tout est moins grave. L’été on s’en fout un peu de ce qu’il peut se passer, parce que le monde s’est mis d’accord avec cet argument imparable “ohhh, c’est l’été c’est pas grave…”.
L’été les gens peuvent arriver en retard, parce que cela nous donne du temps pour se poser sur un banc et bronzer. On peut attendre une table en terrasse plus longtemps parce que l’on ne se gèle pas le temps de fumer une cigarette. Les bars dégueulent de parisiens qui vont de rosé en Ricard, et ça ne nous dérange pas vraiment de marcher sur la route faute de place, parce que de toute façon, Paris se
vide et les automobilistes sont dans le sud. L’été les gens sont beaux. Et disponibles. Ah oui, parce que l’été, les couples se défont plus vite qu’un lacet glissant. Donc forcément l’été, on fait l’amour. On fait l’amour, on baise, on s’envoie en l’air ; peu importe la façon de le faire tant qu’on le fait. Oui j’ai dit “baiser”. Oh ça va, c’est l’été.
L’été, notre work out de la salle de gym au néon grésillant se transforme en cours de yoga matinal face à l’eau. Parce que l’été on veut bien faire des efforts, comme se lever tôt, se coucher tard, ou les deux. L’été, on mange moins, donc on se trouve plus mince, et à Paris, se trouver mince signifie se trouver beau pour une bonne partie de la population. L’été on mange des choses bonnes et fraîches ; de la tomate mozza de l’Italien au coin de la rue à la Carambole de notre cocktail en passant par une tranche de pastèque à la fin d’un barbecue. On mange bon, frais, et surtout on mange sexy. La pêche juteuse dans laquelle on croque a quand-même une autre gueule que la patate raclette du mois de novembre. Et puis des plaisirs sucrés, on ne s’en prive pas. Ca va, c’est l’été.
L’été on fait le tri ; on se débarrasse des tee-shirts que l’on ne met plus, de nos jeans élimés, des plans cul que l’on ne rappelait que lorsque Netflix plantait, et des vernis à ongles qui ont une consistance douteuse. Parce que l’été ; on a le choix. Les fringues sont moins chères, les friches poussent comme des bonnes herbes, et la carte des cocktails s’allonge à perte de vue. Et souvent, on en boit un de trop. Mais bon… ça va, c’est l’été.
L’été on arrête de se lisser les cheveux, on arrête de se maquiller, on arrête de s’habiller et on regarde notre bronzage qui ressort dans nos draps blancs qui ont chauffé au soleil. On marche pieds nus dans l’herbe, et les parcs deviennent nos jardins privés. Mais on veut bien partager les Tuileries avec les milliers de touristes venus découvrir Paris, parce que bon, ça va, c’est l’été.
L’été, c’est le sas de décompression. Le dernier moment que l’on s’accorde avant de prendre les vraies décisions, celles qui vont dicter notre année à venir. Parce que comme les enfants, on continue de compter nos années telles des années scolaires. Et l’été sont les grandes vacances des trentenaires autant que celles des ados.
On s’amuse, on prend un peu plus de temps pour traverser la rue, on exagère nos mouvements, on cale son pas sur celui de la musique que l’on écoute, on ne boude pas lorsque l’on fait la queue pour se chercher à manger, on déteste moins les oiseaux sur les toits et on finit par presque leur trouver un petit je ne sais quoi bucolique. On dort les fenêtres ouvertes en écoutant Paris qui elle aussi, peine à s’endormir à cause de la chaleur. On se dit que vivre autrement qu’en short n’est définitivement pas une façon de vivre et on lance des regards appuyés à ceux qui nous donnent encore plus chaud que les 33°c ambiants. Ca va, c’est l’été.
L’été, on fait des plans sur la comète, on en écrit, on en raye, on repense à certains, et on en repousse d’autres. Parce que l’on peut hésiter, après tout, on prendra les décisions à la rentrée.
En attendant, ça va… c’est l’été.