comment attraper le covid juste avant Noël m’a permis de me rendre (encore plus) compte que les gens que j’aimais étaient la seule chose importante

Avant de me faire tester positive au covid, j’avais commencé l’ébauche d’un article qui parlait de pourquoi 2020 avait été une année incroyable, au sens positif et négatif du terme (sans mauvais jeu de mots).

J’y parlais du fait que cette année écoulée avait été charnière pour moi, et que, malgré cette pandémie qui nous avait tous divisés, tant au point de vue… des points de vue, qu’au niveau physique du terme, cette année avait été l’une des plus incroyables de ma vie.

En revenant en Europe cet été, j’avais pris conscience qu’être loin des gens que j’aime était quelque chose de parfois très douloureux. Voyager seule, c’est vivre les bons moments à 1000%, mais aussi ressentir les moments de solitude comme des moments de profonde tristesse. On remet tout en question, on se sent loin, on se sent petite, et c’est tout à coup très dur de faire la part des choses quand on se sent dépassée par les évènements. 

La lumière au bout du tunnel devient une loupiote dont le bulbe n’est plus très brillant, et la solitude se fait ressentir à un tout autre niveau. J’ai donc profité de l’été européen pour faire le plein d’amour auprès de ceux que j’aime avant de repartir à l’étranger pour la suite de mes aventures. 

Après de longues hésitations sur un retour éventuel pour les fêtes, le confinement grec m’a aidée dans ma décision et m’a incitée à prendre un vol pour Paris afin de passer Noël comme il se doit ; en famille, à débattre de sujets dont tout le monde se fout mais autour desquels tout le monde s’accorde… pour ne pas être d’accord. Le tout, avec beaucoup trop de nourriture végétarienne, afin de pouvoir lever les yeux au ciel quand on me dit “bah oui mais forcément tu ne manges rien donc c’est pas facile de cuisiner pour toi”.

Patience est mère de toutes les vertus comme dirait Roger. 

Les fêtes de fin d’année sont une période qui nous fait comprendre pas mal de choses. On se rend (encore) compte que notre famille — comme beaucoup d’autres — est totalement dysfonctionnelle, et que la magie de Noël se perd trop souvent entre un sapin pas si magique que ça, des billets de train beaucoup trop chers et des cadeaux qui nous font culpabiliser. Mais alors que que je réalisais sous la pluie que la personne sensée me venir chercher à la gare était en réalité à m’attendre dans une autre gare, j’ai commencé à me dire que malgré l’absence de la magie de Noël que l’on ne voit que dans des téléfilms mal doublés sur M6, j’étais assez heureuse d’être en France pour les fêtes.

Puis j’ai été me faire tester pour le Covid, et le couperet est tombé : j’étais positive.

Après le coup de massue propre à un uppercut Joshua-ien, s’en suivent les mille questions logistiques, et le début de l’isolement. Un isolement à quelques kilomètres de ma famille qui allait être dysfonctionnelle, sans moi. Dans cet appartement, seule, à manger des cacahuètes au wasabi et à anéantir la guimauve au chocolat qui ne finirait donc pas au pied du sapin, le tout en regardant Dexter, j’ai été envahie d’une tristesse qui s’immisçait dans tous les pores de ma peau. J’allais reprendre l’avion pour l’étranger sans avoir pu dire aux gens que j’aime, que je les aime.

J’allais repartir sans m’être nourrie de l’amour de ceux qui font que la vie est ce qu’elle est, et sans leur dire à quel point ils sont importants pour moi, même si les kilomètres nous séparent la majeure partie de l’année.

Je n’avais plus de cacahuètes au wasabi, j’en avais marre de Dexter, et il y avait du chocolat fondu sur mon tee-shirt ; j’avais atteint le bout du tunnel, et le filament de la loupiote venait de me péter dans les doigts.

Cette situation m’a fait retourner quelques mois en arrière quand aucun vol ne décollait du territoire sud africain et que je ne savais pas quand je pourrais revoir ceux que j’aimais qui étaient en France.

Et ces deux situations, bien que différentes, avaient un point commun : être dans l’incapacité de voir ceux que j’aime, sans que je ne puisse y faire quoi que ce soit. Ce sentiment d’impuissance qui nous envahit et nous fait passer de la profonde colère à la tristesse de laquelle on n’arrive pas à se dépêtrer. Engluée dans les sables mouvants de la solitude, j’ai passé les dix minutes suivantes à pleurer, sans savoir qui appeler, quoi faire et en n’ayant aucune perspective pour les jours à venir à part me faire livrer 18 kilos de guimauve au chocolat via UberEats et rester en PLS.

J’ai voulu aller courir pour me défouler. Mais je me suis souvenue que j’avais le Covid et que je ne pouvais pas sortir.

J’ai été sur Tinder. Mais je me suis souvenue que j’avais le Covid et que je ne pouvais pas dater.

J’ai voulu aller fumer une cigarette. Mais je me suis souvenue qu’en plus de mon passif pulmonaire, fumer alors que j’avais le Covid n’était pas l’idéal. Et si je mourrais brutalement, je ne voulais pas que les gens voient que la dernière chose que j’avais faite était d’être allée sur Tinder. 

Alors j’ai attendu.

Et après avoir fait un deuxième test dont le stress engendré m’a fait fumer une cigarette à 9h53 du matin tout en étant sur Tinder — résilience bonsoir — j’ai découvert les lettres formant le mot “NEGATIF”, ce qui m’a donné envie de boire une coupe bouteille de champagne. Ce que je n’ai pas fait. Pas parce qu’il était trop tôt, mais parce que je n’avais pas de bouteille de champagne à disposition.  

En faisant mon sac pour quitter mon Airbnb de la tristesse et rejoindre ma famille, j’ai réalisé que toutes les aventures que l’on vit, aussi incroyables soient-elles, n’arrivent pas à la cheville de la seule aventure qui compte pour moi ; l’Amour. 

Et dire qu’il m’a fallu une pandémie pour comprendre ça. Une pandémie, et un sachet de cacahuètes au wasabi.

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