La première fois que j’ai entendu cette phrase, ca devait être dans une série de qualité (genre Dawson) (ou Charmed) (God we’re old)
Je me souviens que ça m’avait choquée. Does he take good care of you. Est-ce qu’il prend bien soin de toi. Et on parlait d’un petit ami. Merde. Attends, est-ce que j’avais séché la trilogie du samedi passé et celle des 24 années précédentes ? Ou Paige était-elle devenue assistée de la vie en l’espace d’un épisode ?
Ouais je connais les prénoms, qu’est-ce que tu vas faire ?
« Prendre bien soin de quelqu’un ». Evidemment que l’on prend soin des gens que l’on aime. On essaie de ne pas les froisser, on prend leur parti quand un élément extérieur vient les énerver un peu, on les réconforte quand ils se sentent comme un mardi pluvieux…
Mais cette notion de protection, d’assistanat qui nous paraît élémentaire dans une relation, merde, et l’indépendance là-dedans ?
Est-ce que les gens se mettent en couple pour avoir quelqu’un qui prenne soin d’eux ?
J’avais mis de côté cette petite phrase qui me faisait hausser le sourcil en me disant que ce qu’il se passait dans les séries US restait dans les séries US. Et puis la dernière fois chez l’ostéo, alors qu’elle m’expliquait que tout mon côté droit était plus coincé que le cœur de cible de Cyrillus, et que je lui répondais que c’était le côté sur lequel je portais mes sacs de voyage / mes affaires de boxe / ma raquette de tennis, elle m’a dit :
— Bah, il n’y a personne pour vous porter vos sacs ? »
— Hmmm…Genre un assistant ?
— Non, genre un petit ami, qui pourrait prendre soin de vous et porter vos sacs pour ne pas que vous ayez mal a l’épaule
Je suis restée outrée. En slip et outrée, à la regarder en plissant mes yeux comme pour essayer de lire un panneau trop loin. A me demander si c’était devenu la norme d’avoir besoin d’être assisté dans la vie, même dans le côté personnel.
Si c’était devenu la norme dans un couple hétéro que les nanas se fassent porter leurs sacs par leurs mecs pour ne pas abîmer leurs petites épaules fragiles.
Si c’était devenu la norme que les mecs aient une nana « qui leur fassent des petits plats maison» parce que bon, eux ne savaient même pas se faire cuire des foutues pates.
Je ne fais pas l’amalgame entre personnes assistées et politesse ou galanterie, et Dieu sait que tous les mecs qui me passent devant en sortant de l’ascenseur se sont vus se faire couvrir de regards noirs qui les jugeaient jusqu’au plus profond de leur âme de mecs impolis. Mais merde, on n’essayait pas de faire avancer les mentalités depuis quelques temps ? Ou nous étions-nous résolu à rester à quelques centaines de Trilogies du samedi de là, confortablement installés dans nos idées préconçues où le but ultime des nanas était celui de ne plus jamais avoir besoin de porter un sac ?
Est-ce que la seule utilité d’être avec quelqu’un était celle de pouvoir prendre chacun une anse pour équilibrer le poids de sa valise ?
J’ai récemment découvert le « cuffing». Il s’agit de se mettre avec une personne quand l’hiver arrive, histoire d’avoir moins froid le soir et de ne pas se sentir trop seul(e) pendant les longues nuits de novembre.
Bienvenue là où le romantisme n’a. Plus. Aucune. Putain. De. Chance.
J’ai lu et relu cet article en me demandant si c’était moi qui était malgré tout une romantique au fond, ou si on avait juste perdu les notions de l’amour, les vraies, celles auxquelles on aspire tous et toutes, dans un sens. Si si, parce qu’entre deux plans cul et trois « m’en fous », à chaque fois que j’entends des bribes de conversation dans la rue / dans le métro / en terrasse / ou à n’importe quel foutu endroit de France et de Navarre, on parle de romantisme, du « bon », du vrai. Alors j’ai du mal à me dire qu’en 2017 et après tous le efforts que des gens incroyables ont fait et font encore pour défendre les valeurs d’indépendance et de féminisme, on se résolve à garder un mec pour pouvoir l’envoyer nous chercher des pop corn pour ne pas rater une minute d’un épisode de Mindhunter.
Mon conseil ? Achetez une valise à roulettes.