les erreurs

Il y a huit ans, je lisais un article dans un musée consacré au rugby qui se trouvait en Nouvelle-Zélande, et j’apprenais pourquoi les All Blacks s’appelaient les All Blacks : 

“Selon Billy Wallace, un joueur vedette de la tournée 1905-1906 interrogé en 1955, les Néo-Zélandais sont surnommés All Blacks depuis qu’un journaliste britannique du Daily Mail, rédigeant un article à l’occasion de leur première tournée européenne, les qualifie de all backs71 (tous arrières ou tous trois-quarts) en hommage au jeu de mouvement de leurs avants. Pour le match suivant contre l’équipe de Somerset, c’est All Blacks qui aurait été écrit dans un journal à la suite d’une erreur typographique et le nom se serait propagé parmi les lecteurs du journal et les spectateurs”

J’ai toujours gardé cette histoire en tête, je la partage très souvent, à des inconnus, à des amis, à des gens qui en ont très certainement marre que je leur raconte des fun facts dont tout le monde se fout. Mais si je partage cette histoire, c’est parce que je trouve ça incroyable que la meilleure équipe de rugby au monde (oui je sais, les Springboks ont remporté la dernière Coupe du Monde — et je les porte tellement dans mon coeur, mais on parle ici des All Blacks, équipe légendaire) tire son nom d’une typo. Un nom scandé, tatoué, gravé, imprimé, porté par des millions de personnes, ne serait en fait que le fruit d’une erreur.

Et en racontant cette histoire pas plus tard que ce matin, on m’a répondu, “la vie est faite d’erreurs”, et j’ai trouvé ça si vrai. La vie est faite d’erreurs, parfois regrettables, et parfois, si parfaites dans leur imperfection. 

Les erreurs ne font pas partie de la vie, les erreurs la constituent. 

Des erreurs de timing, des erreurs de job, des erreurs d’amour, de rencontres, d’engueulades, de rabibochage, d’avions manqués, de trains arrivés en avance, de bus bloqués dans la circulation, de Uber annulés, de tartines tombées sur le côté beurré, de brûlures de café, de doigts coincés dans le tiroir, de cocotiers escaladés qui nous ont valus une cicatrice gardée à vie, de morsures de dents sur l’épaule, de je t’aime dits trop tôt, de je t’aime jamais dits, de je t’aime que l’on ne dira plus, de baisers volés, de baisers rendus, de baisers oubliés, de numéros de téléphone perdus, de téléphone perdus, de numéros manquants, de mauvais numéros complémentaires, d’appels manqués, de tatouages que l’on regrette, de randonnées fermées, de portes escaladées, de conduite fébrile, de jeans coupés trop courts, de lave-vaisselles sales vidés, d’Iphones tombés sur l’écran, de stylos posés sur le clavier avant de fermer son mac, de pages réécrites, de pages effacées, de numéros sans nom, de notes sans titre, de titres sans pages, de post-its qui ne collent plus, de mots bégayés, de mots hurlés, de mots chuchotés, de mots tus, de demi-mots, de mots mal prononcés, de mots que l’on ne comprend pas, de mots que l’on ne comprendra que trop tard, de mots qui n’ont plus de sens, de mauvais vote, de points manqués, d’uppercuts arrivés trop vite, de rendez-vous arrivés trop tards, de swipes à gauche, de swipes à droite, de “on ne recherche pas la même chose”, de “comment ça on ne recherche pas la même chose”, de je m’en vais, de “va-t-en”, de “je le savais”, de “comment je n’ai pas pu m’en douter”, de “c’est le bon”, de “c’est qu’un con”, de “il a déjà été marié”, de “je ne me marierai jamais”, de “save the date”, du “à bientôt” que l’on ne revoit jamais, du “aurevoir” que l’on ne quittera finalement jamais.

Alors je me dis qu’en fait, la seule vraie erreur que l’on pourrait faire et regretter toute sa vie, c’est de ne jamais se lancer par peur d’en faire.

Merci à toutes les erreurs de ma vie, et à celles à venir.

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