En prenant le métro il y a quelques jours, j’ai vu au sol des stickers qui indiquaient que l’on n’était plus qu’à un pas d’une poubelle. Sous-entendu, “courage mon grand, plus que quelques centimètres avant de jeter ton papier de Kinder Bueno huile de palmé, sois sympa, ne le jette pas par terre telle une personne qui s’en bat les couilles de tout. Bisou.*
Donc on imprime du plastique collant par terre comme dernier recours pour indiquer une poubelle dont les gens ne se servent visiblement pas, parce que soyons honnêtes, les gens sont sales.
“Vous n’êtes plus qu’à un pas”.
J’ai l’impression qu’en ce moment, on est à un pas de tout. Mais que l’on a besoin de nous l’indiquer en 4×3 tellement c’est devenu compliqué de voir ce qui se trouve sous nos yeux.
Et quand ce n’est même pas sous nos yeux alors ?
Cette impression d’être à un pas du job dont on a envie, du mec que l’on aimera, du sport qui nous plaît, de l’appartement dans lequel on sera heureux.
Et au final, on a cette sensation d’être à des milliers de kilomètres d’être capable de faire ce dont on a réellement envie, si tant est que l’on sache ce qui nous plaît dans la vie. Et comme le dit cette personne formidable qu’est Nicolas Beretti dans son TedX, on nous a tellement mis dans la tête qu’il fallait la trouver, cette foutue passion, que l’on passe la plupart de notre vie à la chercher, avec la peur de ne jamais la trouver et par conséquent de rater notre vie.
Et de mourir au compte-gouttes en étant obligé de regarder la totalité des saisons d’Inspecteur Barnaby en mangeant des Monster Munch au Ketchup**
Je ne sais pas pour vous mais j’ai tellement l’impression d’être à un pas d’une multitude de choses. Passionnantes ou pas. Et quand je parle avec des gens, qu’ils soient mes amis, ou des inconnus, ou des inconnus bourrés (ou mes amis bourrés aussi, ça arrive), j’ai cette sensation que pour tout le monde, ce petit pas semble être en réalité des milliers de putain de kilomètres
plus qu’un pas avant de faire une rupture conventionnelle et de quitter ce job qui ne nous plaît plus mais dans lequel on reste pour des raisons que l’on a oubliées
plus qu’un pas avant de trouver le bon mec, celui qui nous fera ressentir le fameux zsa zsa zsu et auquel on n’aura pas besoin de préciser que oui, on amène une bouteille quand on est invité chez quelqu’un, et que non, regarder 17 fois son téléphone quand on dîne ce n’est pas poli.
plus qu’un pas avant de partir seul.e en vacances sans rien avoir réservé au préalable
plus qu’un pas avant de trouver le bon lieu pour son mariage, celui qui rentre dans le budget, qui n’est pas à 5h de Paris et qui est disponible avant 2024
plus qu’un pas avant de perdre ces kilos qui nous pourrissent depuis l’enfance et que l’on n’arrive pas à accepter
plus qu’un pas avant de quitter Paris et aller vraiment là où l’on se sent bien
plus qu’un pas pour se mettre en autoentrepreneur et lancer sa marque de fourchettes / fringues / son coffee shop / son tattoo shop / son bar à cocktails
plus qu’un pas avant de tout lâcher et de partir avec son passeport, 8 slips, un ordi, un chargeur et de la crème solaire pendant un an. Ou pour toute la vie.
plus qu’un pas pour dire non aux sorties du vendredi soir alors que l’on a envie de lire en buvant une camomille
plus qu’un pas pour passer végétarien, flexitarien, végétalien, pesco-végétarien, gluten free ou tout régime qui nous semble en accord avec nos convictions
plus qu’un pas pour changer d’appartement
plus qu’un pas pour trouver le bon sport. Ou en changer.
plus qu’un pas pour se dire que oui, on a changé d’ambition, et que ce MBA à 80K avec un job à 90H par semaine dans le conseil en marketing ne nous fait plus du tout envie
plus qu’un pas pour écrire ce bouquin auquel on pense depuis des années
Je crois que l’essentiel, c’est juste d’y aller. Parce que si l’on écoute le côté rationnel, trop rationnel que l’on a en nous, on ne le fait jamais ce pas. On ne met même pas nos chaussures d’ailleurs. Je ne sais pas vous, moi j’aime bien marcher pieds nus, alors j’ai viré mes pompes.
Faut juste faire attention aux petits cailloux.
*ce que, personnellement, j’aurais écrit noir sur blanc. Peut-être même sans le “bisou”.
**Ceci est ma vision personnelle de l’enfer et n’engage que moi