En presque trois mois en Tanzanie et sur les îles qui entourent le continent, j’ai eu l’occasion de dire « TIA ; This Is Africa » un paquet de fois.
J’ai eu un trajet en dala dala (transport local où la densité est d’environ 300000) pendant lequel le sac de la personne à côté de moi a gigoté avant de glousser. Densité 300000 + un poulet vivant donc.
J’ai eu un autre trajet en dala dala où le chauffeur conduisait de façon si sportive qu’une dame est tombée sur le sol du dala dala avec son nouveau-né. Le nouveau-né a vaguement ouvert les yeux, un peu embêté de se faire réveiller de sa sieste. Il m’a regardée, a baillé, et s’est rendormi sans broncher. La dame a décidé de rester par terre et de s’offrir aussi une sieste.
Alors que j’étais en mer, notre bateau a décidé de s’arrêter sur un banc de sable pour profiter de la vue et de la marée qui baissait doucement. Un autre homme s’est arrêté sur le même banc de sable, a sorti un tapis, s’est tourné vers la Mecque et a prié. En plein milieu de l’Océan Indien.
Un dispensary (médecin local) dans lequel je me suis rendue pour une douleur à l’oreille. Le médecin a regardé mon oreille avec la lumière de son téléphone Samsung qui datait des années 2000, avant d’apporter un seau avec des pinces qui elles aussi dataient des années 2000 — avant JC — avant de m’agripper la tête, aidé de deux autres personnes, et de me dire de ne pas m’inquiéter.
Un autre médecin local qui m’a fait un bain d’oreille à l’eau oxygénée au bord de la piscine d’une boutique hôtel.
Un autre médecin (ma santé va très bien c’est génial d’avoir passé la barre des trente ans et d’être dans un pays où tous les éléments essaient de te tuer) qui m’a fait mettre des flips flops, une « blouse » (qui était en fait constituée d’un pantalon taille 48 et d’une tunique taille 54) et m’a allongée au « bloc » avec quatre autres personnes qui faisait des blagues sur les blancs pendant qu’il regardait mon oreille avec ce qu’il définissait de microscope.
J’ai attendu mon taxi plus d’une heure avant de comprendre qu’il ne viendrait pas.
J’ai attendu mon taxi plus d’une heure avant de comprendre qu’il n’avait — en réalité — jamais eu l’intention de venir.
J’ai attendu mon taxi plus d’une heure avant de comprendre qu’il n’était même pas taxi.
J’ai fait du stop, j’ai marché, pris des dalas dalas, bodas bodas (petites motos locales super pratiques pour faire quelques kilomètres mais pas plus parce que pas de casque et routes assez abîmées) (bon okay très abîmées) (bon okaaaaaay ce ne sont pas vraiment ce que l’on pourrait appeler des routes) des taxis, des bus ; avant de me rendre compte qu’au final je ne conduisais pas si mal que ça.
J’ai cherché mes chaussures avant de me rendre compte que cela faisait trois semaines que je n’en n’avais pas porté
Je me suis demandé ce qui n’allait pas avec la douche d’un hôtel d’une copine avant de réaliser qu’il y avait de l’eau chaude et que cela faisait plus de deux mois que je n’avais pas expérimenté ça.
J’ai été surprise quand j’ai eu des jours entiers sans coupure d’électricité chez moi.
Je me suis lavée les cheveux avec du savon et ai porté le même tee-shirt trois jours de suite malgré les 30 degrés ambiants. Et personne n’a trouvé ça choquant.
Je me suis faite réveiller par des chèvres, des buffles, des chats, des chiens. Mais tous les matins depuis quasiment trois mois, je me suis faite réveiller à 5h05 par le muezzin le plus proches de mon chez moi du moment. Et rien que de me dire que ça s’arrêtera bientôt, ça me rend triste.